samedi 3 mai 2014

Florent Lagrange est persuadé que le futur appartient aux makers, à la philosophie punk DIY et aux
whistleblowers. En fuite permanente face à l’automatisation des nouveaux médias, il conduit ses
recherches en infiltrant des systèmes d’information pour rendre sa primeur à l’expérience. Passant
la culture esthétique, politique et populaire des cinquante dernières années au crible de l’héritage
cybernétique, son art définit la piraterie comme une nouvelle néguentropie.
Né en 1983 à Thonon-les-Bains, vit et travaille à Paris
contact@florentlagrange.eu - www.florentlagrange.eu
1966 : Bernar Venet participe à l’exposition Impact I au musée de Céret. De retour d’un séjour à New York où il a vu l’ensemble
minimaliste American Sculpture : Selection I, il prévoie d’envoyer un tube en bakélite coupé en biseau. Faute de moyens il ne peut
pas créer la pièce mais en adresse le dessin industriel sur papier millimétré, laissant à la charge du musée le choix de la réaliser.
Le Tube est finalement montré avec son plan, introduisant dans l’art une relation dialectique entre le signifiant et le signifié,
l’objet et ses spécificités techniques. Cette oeuvre inaugure une période conceptuelle dédiée au traitement de l’information
scientifique.
1967 : l’artiste allemande Charlotte Posenenske s’illustre en concevant les séries Vierkantrohre D et DW. L’assemblage de ces systèmes de
tubes industriels modulaires est également laissé à l’appréciation de ceux qui les exposent.
1968 : Seth Siegelaub publie le Xeroxbook, première exposition entièrement imprimée sans aucune oeuvre-objet. Surtout, Pontus
Hulten tient au MoMA The Machine at the End of the Mechanical Age. Mécontent d’y voir son oeuvre Tele-sculpture, Vassilakis Takis
la retire de l’exposition. Son geste donne naissance à la fronde de l’Art Workers Coalition qui à travers une série de conférences
« open hearing » reconsidère les relations de travail entre artistes, commissaires, critiques et institutions. C’est également en 1968
que Jack Burnham organise Software au Jewish Museum pour acter le déclin de la machine industrielle et l’émergence des technologies
de l’information.
2014 : Florent Lagrange passe au crible de la data, du code informatique et de la 3D quarante années de débat sur la place de la
technologie dans l’art. L’impression de sa mnémosyne ne confine pas seulement aux réflexions les plus en vue dans les domaines
du tech art, mais embrasse simultanément le minimalisme, le conceptualisme, la culture populaire, la poétique et les critiques
platoniciennes à l’égard de la représentation. Documents: Open [Source]: Hearing, dans son titre même suggère la stratification,
comme l’empilement de couches successives déposées par des buses. L’oeuvre appelle une archéologie de l’ars et de la technê. Sur
les cimaises en livre ouvert, trois niveaux de lecture se superposent en fait : le bois d’abord, à même le mur, matière brute sciée,
poncée et peinte comme on le fait depuis des âges appelle la notion de crafting, si chère à Theodor Nelson. Les pages du manifeste
open hearing ensuite, qui malgré l’impression numérique n’ont guère plus de portée sémiologique que la presse de Gutenberg.
Les objets qui en réchappent en bas reliefs enfin, modélisés puis imprimés en trois dimensions. Ces différents degrés techniques
ont à leur pied des chutes de matière : de la sciure, du papier découpé, des filaments de plastique brûlé, pour preuve effectivement
qu’une idée qui prend corps est toujours amputée. L’idéalité des formes, ainsi questionnée, constitue l’encyclopédie d’une connaissance
active et non contemplative. Florent Lagrange clôt même le schéma tri-propositionnel de l’idée de la chose, de l’image de
la chose et de la chose elle-même qu’avait pu vulgariser Jospeh Kosuth. Avec lui les notions de définition, de représentation et
de ready-made volent en éclat. L’artiste est équipé pour les accomplir simultanément avec un seul outil ; l’oeuvre n’est même plus
l’hypothèse du concept, elle en est une fonction.
par Alexis Jakubowicz
Documents: Open [Source] Hearing, 2014. Impression 3D : Plastique ABS & PLA. Impression 2D : Papier Enhanced Matte Espon 220 gr.
imp./couleur, Bois de récupération, Résidus + DocumentBox (Routeur, clé wifi), 200 pièces x [165mm x 235 mm x (10mm)].
Ekimetrics & DatAData (Unité de Recherche)

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